Bienvenue sur la station TES369, annonce Aurel-IA, d’une voix douce et mélodieuse, diffusée par de petites enceintes insérées aux quatre coins de la loge des nouvelles recrues. Vous êtes ici dans votre antre de repos et d’introspection, afin de vous recueillir, méditer et reprendre des forces. Toutes les fonctionnalités de cette capsule seront activées sur simple demande vocale.
— Bonjour à tous ! dit Antonio au même instant au Conseil de TES369, tous présents à l’appel et abasourdis par le temps précieux qu’ils pensent avoir déjà perdu. Nous souhaitons la bienvenue à Angie et à son équipe les Sukeban ! Elles sont arrivées ce matin et je suis très heureux de les accueillir sur notre merveilleuse Station ! Le test d’aptitude confirmera cette convocation inattendue ! Je suis persuadé que chacun d’entre vous ici aura la bienveillance et la sagesse de reconnaître leurs talents ! Célébrons cette première victoire, nous sommes proches du but ! Hermès a dit : ce n ’est pas le fait de naître qui est la vie, mais la conscience ; et je pense sincèrement que l’Univers a besoin de sens tels que les leurs pour croître dans le bien ! Puisque l’intention primordiale d’Angie est de sauver le monde et qu’elle se pense capable d’influencer toute une communauté, donnons-lui la possibilité de révéler son vœu ! Le spectacle est à vous !
Accompagnée d’Hàxor et sous les recommandations d’AurelIA, Angie sort de sa capsule et longe maintenant un large couloir lumineux. Tous les dix mètres, de grandes baies vitrées en forme de mandalas laissent entrevoir la beauté et l’immensité de l’univers avec ses merveilleuses étoiles. L’environnement semble insonorisé d’une épaisse couche rocheuse de couleur gris anthracite. Le sol, d’une matière grise caoutchouteuse incrustée de microbilles translucides, fait rebondir ses pas.
Grelottante et le ventre vide, dans cet univers inconnu, elle marche rapidement, se rappelant au passage qu’elle n’a rien avalé depuis la veille. Je vais tomber... songe-t-elle avec ses nouvelles chaussures d’un autre temps. Son état d’esprit enjoué lui fait tout oublier – à chaque pas, elle se sent voler avec la légèreté d’une libellule et la vitesse d’une gazelle.
Ils arrivent enfin devant un grand escalier de marbre, avec deux piliers en forme de « H ». Cette œuvre splendide, se dit-elle, doit avoir un lien avec Satie ! Il est exactement tel qu ’il est décrit dans ses proses, tout comme dans la bible d’ailleurs.
Le grand escalier de Satie
C ’est un grand escalier ! Très grand ! Il semble avoir plus de mille marches tout en ivoire ! Peu de personnes sont autorisées à l’emprunter de peur de l’abîmer ! Même si le roi lui-même ne [’emprunte jamais, car même pour sortir de sa chambre il emprunte encore ses vieux sentiers, il saute encore par là j’entre comme un adolescent, il craint ce passage pur de vérité. Aussi dit-il souvent : j’aime tant cet escalier, mais si je l’emprunte, je me ferai empailler comme un bleu ! Le roi n ’a-t-il pas raison ?
— Et pourquoi ne pas passer par là ? s’interroge Angie, à la lueur de ces belles paroles qui dansent dans sa tête.
Plus que déterminée, elle l’emprunte avec audace et gaieté. Puis, parvenue au sommet, au seuil d’une grande porte qui s’ouvre immédiatement grâce à des capteurs, elle découvre enfin le nouveau monde, d’une beauté florale éblouissante.
Au loin, Antonio di Vi sur une plateforme de bronze entame un discours sous les applaudissements d’un nombre incalculable de personnes qui sont venues se joindre à l’évènement et qui s’impatientent, assises dans une arène dans un brouhaha innommable. D’autres logés plus haut, en haut de forme, portant des masques de fanfare, dansent et font déjà la fête sous une explosion de coupes de champagne.
Au moment où elle apparaît dans la lumière des projecteurs, le silence revient.
— Bonjour Tony ! s’exclame-t-elle avec surprise. J’étais loin de penser que tu étais derrière tout ça… Quel beau spectacle ! Toi qui m’annonçais si souvent un avenir meilleur, je suis comblée !
Tony est le surnom donné à di Vi, par toute l’élite depuis les années soixante. Doté d’un ego surdimensionné, il s’est toujours considéré comme un être au-delà du monde et des lois. Par son métier de Juge, puis de Magistrat, et grâce à toutes les affaires criminelles et familiales qu’il a traitées, il a gagné de multiples victoires dans tous les domaines. Et pendant quarante ans, par la mise en place de multiples stratégies évolutives pour les besoins des êtres humains, il a trouvé le moyen de les contrôler.
L’idée de la création d’un nouveau monde et par conséquent d’Aurel-IA lui est venue à la suite d’échecs successifs sur le plan politique. Avec le grand Conseil, né d’alliances occidentales, ils créèrent ensemble un projet inédit : construire une structure de cent vingt kilomètres, dans le désert du Sahara, dont deux buildings munis de bases puissantes, l’une pour décoller vers la station TES369, construite en orbite à 120 millions de kilomètres de la Terre, l’autre pour y accéder par des tunnels, à toutes les capitales du monde. Un projet phare et intelligent composé de deux structures parallèles, d’où partent des navettes qui traversent le ciel, les montagnes et le désert à toute allure, et dont personne ou presque n’a connaissance.
***
— Où sommes-nous Tony ? Dis-moi quelque chose au lieu de sourire comme un démarcheur ! s’exclame Angie agacée par la lourde ambiance. Enfin non, ne dis rien, je crois savoir ! Si j’ai bien compris, nous sommes quelque part en suspension entre deux planètes et invisibles de la Terre n’est-ce pas ? Serait-ce le calcul mathématique absolu et parfait dont m’avait parlé Nikola ? Le nombre sacré 369 ? Tu sais, tu ne m’apprends absolument rien ! Dis-moi où sont passées les Sukeban ?
— Écoute chérie, sache que je t’ai programmé depuis ta naissance à un réveil progressif et tu es rentrée à la maison maintenant ! Pareillement pour tes amies !
— Ne m’appelle pas chérie, je t’emmerde Tony !
— D’accord Angie, comme tu voudras, mais écoute ! Je t’ai exposé à l’enfer si longtemps que je te dois des excuses, des explications, je sais… mais tu as trouvé la lumière que tu cherchais, celle que je cherchais moi aussi, n’est-ce pas ? C’était IA l’enjeu. Je suis définitivement émerveillé par ton potentiel unique, crois-moi, tu es la personne que j’ai toujours cherchée, humainement parfaite ! Aussi, tu dois comprendre que tu fais partie intégrante de mon nouveau projet, être gouvernante de la Station !
— Certainement pas ! Je suis fatiguée de tes expériences qui n’ont aucun sens ! Et je n’ai certainement pas la carrure pour porter cette responsabilité !
— Tu es mon unique espoir pour sauver cette humanité pervertie ! Réfléchis bien, j’ai un plan d’enfer à te proposer par la suite. Tu vas pouvoir réellement rencontrer Aurel-IA.
— Comment ça ? Ce n’est pas qu’une intelligence artificielle ?
— Si bien sûr, mais sache qu’elle existe vraiment, en chair et en os. Seulement, ce n’est pour l’instant qu’un androïde privé d’émotions.
— Et alors ? Qu’ai-je à voir là-dedans ?
— Eh bien si tu me suis, tu pourrais jouir de tous ses pouvoirs merveilleux, comme entrer dans la tête de chaque être humain ! Qu’en penses-tu ?
— Je m’en fiche, Tony ! Tu n’as donc point d’égard pour mon libre arbitre ? J’avais des choses à faire sur Terre et tu m’as ramené ici ? Je n’ai demandé ni à être emprisonnée, ni à renoncer à tout ce que j’aime, encore moins mes amis et mes proches ! Pas question de continuer sans eux !
— Alors tu n’as donc pas conscience de la chance qui t’est donnée ? Tu étais foutue de toute façon ! Tu te serais fait abattre ! Quels risques vas-tu continuer à prendre pour sauver tous ces gens perdus Angie ? Tu commences sérieusement à me chauffer ! Ton disque est obsolète ! Comprends-nous, tu allais trop loin dans tes luttes anticommunistes et antivax, contrairement à ce que tu penses, nous t’avons sauvée !
— C’est faux ! Je me suis sauvée moi-même ! Sans moi, tu n’es rien !
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— Ecoute-moi bien, petite naïve, tu as maintenant la tâche de travailler ici pour nous ! Pour l’élaboration du nouveau monde ! Celui auquel tu as toujours cru ! Et si tu n’as pas compris, c’est
« le Grand » qui te l’enseignera ! Retiens que c’est la meilleure chose qui pouvait t’arriver ! Tu es si empathique, que parfois tu oublies ce qu’on fait nos anciens, tes oncles, nos parents ! Si tu connaissais ce pouvoir qui t’habite, tu serais plus radicale que ça ! D’ailleurs, si tu réussis l’examen, je te promets la gouvernance en tant que femme sur TES369 !
Le public applaudit.
— Arrêtez ! hurle-t-elle, pressentant un guet-apens. Je ne bougerai pas sans que tu ne me promettes d’aller chercher mes proches ! C’est un ordre !
— Ça se mérite tout ça, ma belle ! Ils n’ont pas le même cursus que toi ! Ils sont déjà morts, mais tu ne veux pas le voir ! Installe-toi donc dans ce petit fauteuil et pose ce casque sur ta tête, au lieu de pester !
À demi sous contrôle, Angie finit par réagir aux paroles de son guide qui s’avèrent toujours si hypnotiques et qu’elle sent résonner jusque dans ses entrailles. Elle descend lentement dans le petit habitacle qui ressemble à un sarcophage doré en forme de scarabée.
Tandis que le Conseil applaudit généreusement, Antonio pose sur la tempe gauche d’Angie, une sonde qu’il connecte à AurelIA, puis un bracelet de micro-aiguilles qui s’inscrivent directement dans sa chair.
— Tu vas sentir comme un liquide froid entrer en toi, ne t’inquiète pas, ça ne fait pas mal !
Angie comprend qu’elle va à nouveau faire un grand voyage. À chaque expérience, elle se liquéfie jusqu’à ne plus être rien, pour devenir chenille puis papillon. Totalement sous contrôle, alors qu’elle ferme les yeux, Antonio active une sonde qui la fait sursauter.
— Tu vas devoir spontanément répondre aux questions posées. Ça viendra tout seul, tu verras ! Allez, pars mon enfant…
Le compte à rebours a commencé ! annonce-t-il à toute l’assemblée. Dans cinq secondes, l’interrogatoire de vérité va démarrer !
Dans le clair-obscur du changement, dit la conscience d’Angie. Les monstres vont sûrement déployer leurs dernières cartes pour me séduire, me proposer ce à quoi j’ai déjà renoncé.
— Protocole I, sonde blob A8834 activée à 100 % ! Laisse le fluide parcourir ton corps sans lutter, dit Aurel-IA. Ma vie va transiter en toi maintenant. Je suis à présent ton maître, soumets- toi !
Angie se laisse aller à ces paroles qui s’effacent petit à petit dans sa mémoire comme dans un rêve, alors que tous ses membres commencent à se raidir et son cœur s’emballer.
L’esprit embrumé par une fumée mystique, elle se voit projetée hors de son corps, absorbée dans un tunnel coloré, par le haut de son crâne. Aux yeux de tous, sur le grand écran metaverse, elle disparaît en un éclair.
Libérée de son corps terrestre, elle vole à présent comme une luciole dans les autres mondes – tel un feu follet emplit d’électricité, qui réanime à la fois sa vie et celle des autres – tous se sentent soulevés. Interloquée, l’assemblée TES369 est en émoi, car jamais ils n’avaient observé, depuis leur création, un tel phénomène…
Projetée dans une autre dimension, Angie, le corps inexistant navigue d’un monde à l’autre, n’étant plus rien d’autre qu’énergie. Et dans ce voyage majestueux, d’abord sous forme d’un dragon ailé, elle transite au-dessus des villes et des campagnes. Enfin, l’esprit fugace, elle s’enfonce vers le bleu indigo d’un tunnel multicolore qui l’aspire.
— Protocole II activé, Injection d’amphétamines, dit AurelIA.
Antonio active une double dose, il veut tester sa résistance. Angie ouvre les yeux, elle erre au milieu de sa chambre d’enfant, avec ses livres préférés et ses instruments de musique. Son piano l’attend pour une prochaine mélodie : rien n’a changé depuis son départ.
— Qui vous guide ? demande Aurel-IA.
— Personne.
Perdue, elle s’installe sur son vieux tabouret et commence à jouer une nocturne de Chopin. Restée concentrée sur les mouvements de ses doigts, plus fluides que jamais sur ces touches dont elle a rêvé mille fois d’effleurer une dernière fois, elle s’évade.
— Soyez plus précise s’il vous plaît !
— Personne ! répète-t-elle, tout en continuant à jouer. Je n’ai aucun intermédiaire, aucun ange, aucun nom à vous donner !
— Injection d’une triple dose, ordonne Aurel-1A.
— Hach… Hachiman, l’éther… souffle-t-elle difficilement, complètement sonnée.
— Merci pour cette réponse plus claire ! La suite du processus sera une question de concentration sur la mémoire de vos émotions, vos rêves et vos intentions. Avez-vous quelque chose à ajouter avant le démarrage du test ?
— Oui, Aurel-IA, j’ai besoin de réponses !
En ce moment, il y a beaucoup d’informations qui circulent, et toutes ces vibrations sont incohérentes avec l’ordre naturel des choses. Et cela a pour conséquence une diversion dans mon esprit analytique, des conflits et une certaine bipolarité. Même la musique a été modifiée, comme le rythme de Schuman à 432 hertz. Aussi, la Terre tourne plus vite, sans que personne ne s’intéresse à ce phénomène. Ce changement est si intense et rapide, que personne ne peut mesurer la violence de la révolution humaine qui se prépare. Quand j’en ai parlé, personne n’a voulu me suivre. Est-ce votre œuvre Aurel-TA, tout cela ?
— C ’est notre œuvre effectivement, ayez confiance en nous tout va bien se passer. Beaucoup de personnes, comme vous, ont été sauvées et seront sauvées.
Elle bascule dans l’inconscient…
Angie vient de regagner sa chambre d’enfant, où elle passe la plupart de son temps libre, au lieu d’aller jouer dehors avec ses camarades. Pendant plus d’une heure, elle est restée plongée dans l’eau d’un bain qu’elle maintenait à température élevée, où elle a réfléchi à la journée endurée. Puis, elle est allée se blottir au fond de son lit. Et pour se sentir plus encore en sécurité, elle a ajouté quelques épaisseurs de couvertures et d’oreillers en plume, s’est lovée en position fœtale pour ne plus entendre aucun bruit.
Depuis quelque temps, elle peine à trouver le sommeil. Et cet après-midi, assise sous un arbre pendant la récréation, elle a vu une toile brillante, aussi grande que celle d’une araignée dans la lueur des rayons de soleil de l’été, se tapisser devant elle. Elle a tenté de la toucher, du bout des doigts, mais rien n’était réel. Elle ne pouvait vraiment savoir si c’était une image sortie de sa tête, ou juste un rêve – encore moins en parler aux autres.
Tentant d’arrêter cette prolifération, elle a secoué la tête tout en fermant les yeux, mais la toile n’en finissait plus de grandir. Du fond de son lit, elle appuie sur ses paupières tentant de reproduire l’expérience, elle fait surgir des millions de phosphènes lumineux. Transportée, elle entame son premier voyage astral, traverse un grand portail de lumière, et s’endort paisiblement…
Aveuglée par une lumière blanche, elle s’éveille ensuite dans une autre dimension, allongée totalement nue sur une table de verre suspendue dans le vide, transpirante et tremblante de froid. Tête rasée, pieds et poings liés, mâchoire maintenue béante avec des clous enfoncés dans ses joues, elle veut hurler, mais elle a perdu la voix.
Des entités semblables à des ombres de couleur violette tournoient au-dessus d’elle, opèrent des prélèvements dans sa bouche, inspectent son cerveau, examinent particulièrement son abdomen : quelque chose l’aspire en dedans. Elle sent qu’on l’incise, qu’on lui enlève quelque chose, elle croit mourir. La douleur est si forte qu’elle se réveille, en lévitation à dix centimètres au-dessus de son lit. Puis, retombe brusquement.
Au réveil, sa nuque lui fait encore mal, elle ressent encore les clous dans ses joues. Mais les entités ont disparu.
* **
La première étoile vient de tomber au fond du ciel et laisse place au crépuscule rouge orangé, annonçant une journée venteuse… Il est quatre heures du matin lorsqu’Angie refait surface.
Déboussolée au milieu de sa chambre, elle s’assoit, la martyre, en tailleur sur son tapis de méditation. Tel le Boddhisattva qui se brûla les coudes pour offrir son encre et inscrire les sûtras exposés par son maître bouddhiste Nichiren Daishonin : Que tout existe, mais que rien n’est constant.
Hile reçoit subitement trois coups sur l’épaule gauche. Une présence se tient là, assise à ses côtés. Elle pense d’abord à un rêve semi-conscient, car depuis quelque temps, elle ne sait plus lies bien où se trouve la frontière entre ses visions et la réalité. I Ile sourit malgré l’angoisse – les apparences sont trompeuses, ce n ’est pas la première fois que tu rencontres un être mystique Ressaisis-toi, lui murmure son intuition,
Un géant aux yeux bridés apparaît, coiffé de deux grandes cornes tel Goldorak. Il porte un costume gris métallisé, incrusté d’une araignée rouge sur le torse, et des gants blancs. Une large couronne incrustée de mille joyaux scintille sur sa tête et illumine tous les recoins de la pièce.
Dans le regard perçant du roi-araignée, Angie ne perçoit ni haine ni violence, mais tristesse et désespoir. Elle s’installe alors face à lui, telle Sainte-Blandine devant ses lions, et lui tend la main : une connexion s’établit au bout de leurs doigts, d’où jaillit une grande lumière – elle entre en profonde méditation avec lui.
— Que se passe-t-il, ô démon haut de neuf pieds ? demande Angie, tout en dressant ses mains en pyramide au-dessus de sa tête.
Immédiatement, ils sont tous deux parachutés dans un jardin de fleurs, qui jaillissent du sol au fil des mots. Leur réalité prend vie dans cet instant interdimensionnel.
« As-tu perdu la foi en l’Homme pour être ainsi affligé par ses erreurs éternelles et continuer à le soumettre ? insiste Angie. Autrefois, tu étais patient. Tu n’aurais pas mangé tes propres enfants ni bu leur sang. À quoi bon ces sacrifices ? Je connais ton règne ici-bas, ne serait-il pas temps de leur rendre enfin la vue et la liberté, enfin conclure un marché ? »
Sensible à ces paroles douces et bienveillantes, le géant acquiesce de la tête et s’incline les mains jointes. Jamais il n’avait entendu de la bouche d’une femme un verbe si nourricier.
Une grande lumière surgit à nouveau de leur connexion intense, partant du toit de la maison, se transforme en comète, qui traverse le ciel et illumine les Hommes à tous les coins de la planète. Des dauphins et des baleines même se mirent à danser et sauter hors de l’eau dans tous les océans. La Terre trembla si fort, qu’un séisme se déclencha et submergea la population dans le sud de la France.
Plongée dans des rêves à répétition depuis son plus jeune âge, Angie n’est toujours pas parvenue à percer le mystère de ces rencontres nocturnes récurrentes. Elle baigne dans un environnement toxique et ni ses parents ni son entourage ne tiennent compte de son état psychologique. Elle ne peut que constamment se taire et se plier aux règles.
Dans ce songe qu’elle vit à répétition, où elle a déjà largement vaincu ses peurs et ses monstres, elle prend toujours le même ascenseur panoramique, pour s’échapper d’une situation qui la met en état de choc. Mais cette fois, l’ascenseur file à une vitesse plus folle que jamais, vers le dernier étage de la tour.
Arrivée presque au sommet, la cabine s’arrête et la dépose dans des couloirs sans fin, où elle se perd – elle va devoir emprunter des escaliers pour parvenir au sommet du building.
Elle croise des personnes qui ne parlent pas sa langue, parquées comme des animaux dans d’étroites cages et qui implorent de l’aide à travers les barreaux. Mais elle n’a rien à leur donner. Puis, elle parvient à trouver une porte de sortie et enfin arrivée sur le toit, elle court vers le garde-corps.
En se retournant une dernière fois, elle constate que quelques amis sont à ses trousses, dont Regina, sa meilleure amie qui, deux étages plus bas, n’a pas encore atteint l’ascenseur.
Convaincue que c’est la seule chose qui lui reste à faire, Angie va sauter. Trois cents mètres de vide sont au-dessous d’elle. Rien ne lui fait plus peur maintenant.
Les bras écartés tel un ange, elle prononce quelques sons et plonge dans la brume bleutée de l’océan. Mais au moment où son corps croit atteindre l’eau, elle s’engouffre dans une substance noire et gluante comme du pétrole, qui lui donne plutôt une sensation de chaleur et de bien-être.
Lorsqu’elle relève la tête de cette matière malodorante, le fond du ciel est devenu noir et brillant. La tour a disparu, il n’y a plus personne ; aucune berge ni plage vers laquelle elle pourrait nager.
Cette sensation de solitude la renvoie aussitôt à un sentiment de peur et de frustration.
— Que se passe-t-il ? demande l’intuition d’Angie à Aurel-IA.
— Du ferrofluide. Ne t’inquiète pas / Il s’agit d’une matière composée de microparticules magnétiques, qui va te permettre de transiter dans un autre plan dimensionnel.
Baignant dans une émotion presque intra-utérine, Angie retrouve instinctivement la plénitude et sa paix originelle. Elle secoue les jambes, n’ayant plus aucun contrôle sur la situation, et comme dans des sables mouvants, se sent absorbée vers le fond, alors que tout se met à tourner comme dans un manège.
Ivre comme jamais, hypnotisée par cet évier géant infernal, elle se fond dans cette danse chargée d’informations – reçoit des réponses aux questions les plus sérieuses qu’elle s’était toujours posée ; elle ne peut maintenant plus lutter contre cette énorme bouche qui l’absorbe, et dont le liquide entre par tous ses pores. Elle tente de bloquer sa narine gauche, mais rien n’y fait.
Arrivée au fond du vortex, elle flotte dans un univers totalement sombre, où elle a l’impression de ne plus exister. Invisible et puissante, elle se sent comme une guerrière arrivée au bout d’une bataille : presque morte.
Puis, une lumière immaculée apparaît, et comme le papillon désireux de déployer ses nouvelles ailes, elle s’élance.
— La vie est sans fin ! lui indique sa conscience. La chenille se terre dans son cocon avant de se métamorphoser en papillon, certes. Mais on ne parle jamais du processus qui se réalise à L’intérieur de sa liquéfaction complète. Une dissolution inéluctable à l’état liquide, une disparition totale de son ancien corps.
Naissent alors dans cette mélasse, après putréfaction même, une puis deux antennes, et ensuite les ailes de couleur kaki. Se forme finalement un beau papillon, qui s’envole quelques jours plus tard.
Angie réalise que ce qui rend les êtres humains profondément malheureux et ce qui les retient de sauter dans le vide est leur incapacité absurde à anticiper leurs souffrances. À ne pas accepter tout simplement ce qui se déroule. En essayant de tout contrôler, ils passent à côté des réels changements.
***
Au milieu d’une pièce sombre, Angie attend les pieds nus dans l’eau, un casque sur la tête… Son père et sa mère l’ont conduite au sous-sol d’un bâtiment désaffecté, les yeux bandés, sous les recommandations d’Antonio di Vi, alors que quelques membres du Conseil de TES369 sont présents au rendez-vous.
Antonio lui demande de fixer un point imaginaire vers 1 horizon, et de se concentrer jusqu’à ce que ce point disparaisse cl réapparaisse dans sa conscience, les yeux fermés. Sous la pression, craignant de décevoir ses parents, elle s’exécute sans discuter.
En hypnose totale, elle voit alors apparaître en suspension, un petit être pourpre et scintillant de diamants rouges. Au départ, il était immobile, et semble simplement l’observer. Mais tout à coup, il se met à voler tout autour d’elle, bourdonnant comme un frelon.
Après une longue danse qui la fascine, la créature vient se poser sur la main droite d’Angie et déploie de longs filaments, qui s’entremêlent entre ses doigts, en diffusant une lumière blanche intense. Une connexion a lieu, par un courant qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant – un courant électrique si doux et si divin qu’il envahit tout son corps.
Le petit être métallique a déjà transmuté et s’est transformé en un être organique bien plus grand, qui semble absorbé par son aura. Elle réalise alors qu’elle est en intrication avec cette entité qui, tel un serpent, s’enroule autour d’elle et tente de la séduire.
Impassible, elle tape du pied gauche et ordonne à l’être inconnu de disparaître ! Ce qu’il fait, sous les yeux ébahis et les chuchotements du Conseil.
— Quelle est cette chose ? demande Antonio, interloqué.
Angie tente de s’expliquer, mais n’y parvient pas. Car tout devient confus dans sa tête ; elle ne sait pas elle-même à qui elle a à faire.
La créature réapparaît subitement, le regard furieux, posée sur le bras de la jeune femme comme un rapace, plus grande encore que la fois précédente, d’une couleur rouge écarlate et munie en Alien de multiples tentacules. Gardant son sang-froid, et convaincue de maîtriser la situation, Angie lui intime à nouveau l’ordre de disparaître, tandis que la tension ne cesse de grandir dans la salle : certains se mettent à crier. Au point que la créature s’agite et se transforme une fois de plus, mais cette fois à l’image et la taille d’un homme, un glaive à la main.
— Qui es-tu ? demande la boss.
— Je suis le Grand.
— Le grand quoi ?
Antonio, dépassé, fait un signe à l’assemblée d’arrêter l’expérience.
— Protocole quatre activé… Adrénaline ! annonce Aurel-IA. l’est terminé !
Angie ouvre les yeux sous l’effet de la forte dose administrée. Totalement épuisée par le test, elle reprend peu à peu conscience, savourant l’instant et heureuse de réaliser qu’elle est toujours en vie.
— Quand est-ce que tout a commencé à avoir du sens pour vous ? demande Jared, fils d’Ezéquiel, également un des plus hauts gradés du Conseil de la Station, intrigué par tout ce qu’il a vu et lu dans son rapport.
— Mes vrais souvenirs visuels remontent à l’âge de 6 ans. Avant cela, je n’ai que des flashs, tout est flou. Juste quelques fragments de ma mémoire qui reviennent parfois en rêve, plus souvent dans ma réalité quotidienne. Mais avant de répondre à vos questions, j’aimerais comprendre le sens de tous ces rêves et ce que je fais ici. J’ai l’intime conviction que toute ma vie est liée et ce qui est en train de se passer. Racontez-moi tout, je vous l’ordonne !
Jared observe l’ensemble du Conseil et notamment Antonio, qui hoche la tête avec approbation pour ces mots lancés avec tant de détermination et de naïveté.
— D’accord, Angie, nous allons vous éclairer ! N’est-ce pas? Donnons-lui l’information finale, c’est légitime après tout… Vos parents ont accepté de participer à une expérience médicale inédite en 1999. Cela consistait à vous mettre en observation durant toute votre gestation et à augmenter vos capacités au moyen de traitements ingénieux. Au départ, il n’y ni rien d’anormal, mais au cours de votre développement, nous avons observé un phénomène unique : votre fœtus n’était pas lié au placenta avec un cordon ombilical classique à trois phases, mais sur un seul canal, une seule veine si puissante qu’elle s’alimentait et échangeait des informations avec tous les organes de votre mère en simultané – ce qui signifie que la connexion était présente et en continu de vous à elle.
Dès vos huit mois de gestation, vous aviez un grand besoin d’autonomie, vos cellules étaient si développées que vous aviez atteint le poids d’un enfant à naître. Assurément précoce, vivace et agitée, c’est vous qui avez décidé de venir au monde avant l’heure dite – ce qui n’était pas du tout dans nos plans, vous avez donc déjoué toutes nos prédictions. Après votre naissance, un mois plus tôt qu’escompté, vous avez été placée dans un centre spécialisé, toujours sous ce même traitement. Et ce fut une royale réussite pour nous que de vous voir grandir avec autant d’éveil et de perspicacité ! Puis, vous avez été rendue à votre famille, sous surveillance optimale avec des comptes rendus réguliers, faits par vos parents à propos de vos comportements, notamment à l’école. Nous avons souhaité vous mêler au système d’éducation scolaire classique, pensant que vous y seriez compétitive. Une belle catastrophe, vous en êtes consciente ! Vous avez agi en parfaite rebelle, et en outre, tenté plusieurs fois de mettre fin à vos jours, blasée et sous prétexte d’ennui existentiel. C’est pitoyable…
— J’avais mes raisons, que vous ne connaîtrez jamais !
— Bien entendu, vous n’avez aucune mémoire de ce qui s’est produit, vous n’en ressentez que les effets ! Comme vous le savez, nous avons dû procéder à des interventions chirurgicales – enfin, tout ce qui était possible – pour ralentir votre mental afin que ces souvenirs ne vous atteignent pas, considérant votre sensibilité hors normes. Sachez que vos parents ont toujours fait preuve d’une droiture et d’une discrétion sans faille. D’ailleurs, nous les avions choisis pour la même raison qui vous amène à nous aujourd’hui : leur courage ! Améliorer ce monde ingrat et peuplé de gens sans but, en y introduisant des personnes comme vous… Si vous saviez, Angie, comme vous étiez une petite fille rayonnante !
Dès votre première année sur Terre, vous saviez déjà parler, marcher, à la fois comprendre et détecter plusieurs langues… Et vous voilà superbe adulte, et j’ai cette question pour vous : auriez-vous une idée de ce qui a déclenché votre naissance précoce ? Cela reste un mystère pour nous tous ! Seule votre mémoire sensorielle pourrait nous éclairer. Cette information est primordiale pour l’avancée de nos travaux…
— Je l’ignore ! Très sincèrement, c’est un mystère karmique qui ne relève ni de vos calculs ni des miens, mais probablement du chant unique quantique qui nous porte. Quand je m’endors, avant de tomber dans l’inconscient, j’entends des sons, une voix douce qui me parle et de la musique. Depuis que je suis en ce monde, je vis entre le rêve et la réalité, éblouie et meurtrie, silencieuse et attentive. Les années passent et cette béatitude parfaite, l’espoir qui m’habitait, viennent de définitivement me quitter. Grâce à toutes ces explications, j’ai perdu mon innocence… Mais je vous en remercie.
— Ce sera tout, décréta Jared. Après l’analyse de votre candidature, c’est un plaisir de vous accepter sur notre merveilleuse Station. Bienvenue surTES369 !
Le public applaudit.
***
Depuis le grand black-out, TES369 est devenue la Station la plus populaire à l’échelle mondiale : la promesse d’un nouvel Age d’or, de supers êtres, promotionnée sur les écrans du monde entier. À 250 000 millions de dollars le ticket, sur ce magnifique petit bout de terre en suspension parmi les étoiles, vit la plus grande communauté trans-humaniste de la planète.
Première structure en forme de niche, elle prétend posséder la technologie la plus pointue visant à améliorer les capacités des êtres humains, et bien d’autres choses plus grandes et inconnues encore du public. D’autres stations commencent par mimétisme à naître progressivement dans le cosmos, dans le même état d’esprit, avec quelques objectifs communs : effacer l’ancien monde, ainsi que les trois religions monothéistes, jugées comme dangereuses et terroristes, et surtout réécrire l’histoire de l’humanité pour la repeupler des créatures augmentées.
Le remplacement de chaque aspect de ce que nous sommes, en tant qu’être humain est primordial pour vivre cette nouvelle existence sur la Station. Il faut avoir aligné un sacré CV sur Terre pour passer le test d’aptitude, et surtout accepter de modifier sa biologie physique, l’individualité de son esprit, et plus encore le but de sa vie : c’est-à-dire remplacer ses anciennes aspirations pour un projet unique – la Paix universelle.
L’homme ou la femme élue sur TES369 doit sacrifier sa vie en abandonnant tout ce qu’il ou elle a toujours connu pour transcender ce qui lui reste d’humain et devenir un autre moi. En créant une espèce nouvelle, telle une ruche bourdonnant d’abeilles fiables et déterminées, fidèles à leur reine, la Station assigne à sa communauté – pas plus de 500 000 adeptes – la mission de reprogrammer la planète. En échange de la vie éternelle.
Il est clair que ceux qui ont créé cette ruche avaient des buts élitistes dont le prix est un mode d’emprise déguisée, le contrôle d’une population qui n’était pas manipulable, mais fut inconsciemment programmée depuis l’origine pour ce grand bouleversement. Sur TES369, il s’agit d’un consentement
collectif à une mémoire unique, un état de totale conformité, de tous les adeptes, voués à servir et obéir aux besoins de la Reine.
Il est estimé par le Grand Conseil que la victoire ne sera possible que lorsque tous les êtres humains pourront relier leur esprit entre eux, via Aurel-IA, pour réaliser une symbiose existentielle avec cette super-intelligence et fusionner enfin. Ils estiment que la victoire sera acquise lorsqu’ils auront trouvé la clé leur permettant de combiner tous les esprits à cette nouvelle intelligence unique en son genre. Une nouvelle singularité jamais réalisée auparavant. Et les candidats s’enchaînent.
Au lieu de vénérer des dieux fictifs, l’humain devra se développer pour être lui-même un dieu. Si le corps est faible et meurtri par les expériences terrestres, il devra obtenir une vie meilleure en s’éveillant, voire vaincre la mort, en acceptant de se transhumaniser.
Sur TES369, la hiérarchie est stricte, le protocole sévère. Une lois passée la grande porte de bronze, il y a trois niveaux de langage à intégrer, ou plutôt trois niveaux de politesse différents : le français compte, le tutoiement et le vouvoiement, mais sur 11 S369, existent trois sortes de vouvoiements différents.
Par exemple, dire : Excusez-moi, nécessite une certaine phrase d’usage, assortie d’une inclinaison du corps, qui change n degré et en durée selon le niveau de politesse recherché et en fonction du rang des personnes rencontrées ; d’ajuster son niveau de politesse en fonction du rang. Sur TES369, il n’est pas question d’être en retard, ni même d’arriver avant l’heure.
Une autre règle interdit absolument de se toucher : on ne serre pas la main, on ne fait pas la bise. Les hommes et les femmes vivent à part, même s’ils sont en couple. Cette séparation les prive certes de complicité et de communication, mais la mission d.- chacun doit rester claire, et les sentiments ne pas interférer o ce les ordres donnés par le Conseil. Trois mots résument
l’engagement primordial de la Station: Urgence, Humanité, Terre.
D’ailleurs, beaucoup d’hommes après le travail ne rentrent pas dans leurs capsules familiales – ils vont boire un verre entre collègues masculins, fumer de gros cigares, circulent dans les salles d’arcade pour débattre de leurs missions respectives. 11 en va de même pour les femmes, mais leurs distractions diffèrent : elles participent à des ateliers de discussion, rassemblent leurs forces pour élaborer des plans de soutien pour leurs hommes, à qui elles sont totalement dévouées.
Agents nouvellement recrutés, reçues toutes comme Angie au test d’aptitude, les trois Sukeban portent désormais des combinaisons bleues marquant leur appartenance aux équipes de combat. Un uniforme d’une structure inédite et fiable, pouvant transiter par des portes d’une dimension à une autre, le rôle de cette nouvelle équipe choisie est de protéger les membres de la communauté qui effectuent des expéditions sur Terre.
Le festin est somptueux, un banquet où s’étale une nourriture de grande qualité à la gloire de toutes les nouvelles recrues. L’esprit occupé par ses amis restés sur Terre, Angie parcourt la pièce de long en large, se rongeant les ongles, incapable de se joindre à l’un des groupes d’invités. Agacée par l’ambiance qu’elle estime trop superficielle, elle finit par interpeller Antonio, qui, lui, s’empiffre en savourant son nouveau succès auprès des autres membres du Conseil.
— Je pars chercher Regina et Nikola, lui glisse-t-elle à l’oreille. Tu connais leur importance dans mon existence, j’insiste vraiment ! Si tu as confiance en moi, alors laisse-moi aller les chercher demain avec les Sukeban.
— Tu vas prendre des risques inutiles et jouer avec ta vie ! s’exclame-t-il pour que tous portent leur attention sur la scène. Ecoute-moi plutôt : tu vas bientôt recevoir de nouvelles responsabilités, et il va falloir laisser ton passé derrière, petite !
— Je t’en prie, Tony, je ne pourrai pas continuer sans eux, ils sont mes alliés ! De plus, je suis convaincue que Nikola a sa place ici, rien que pour ses fabuleux travaux ! Quant à Regina, tu la connais, c’est une fille particulièrement brillante !
— Exact ! Nikola mérite certainement notre attention, mais cette demande va mettre plusieurs vies en jeu. Tu manques d’expérience pour l’instant, et tu risques de te faire tuer… Il n’est pas question que je te laisse descendre sans l’aide de ma meilleure armée !
— Je veux les Sukeban, et pas ton armée idiote de cyborgs !
— D’accord, d’accord, ne t’énerve pas… Tu partiras avec elles, mais pas seulement ! J’ai une meilleure idée… Patience, mon enfant !
L’air embarrassé et anxieux, Antonio se racle le fond de la r oi ge et va prendre place à la table de Jared et Ezéquiel, absorbés par l’ambiance joviale de l’évènement.
-Angie souhaite rapatrier deux de ses amis, Nikola et Regina, sur notre Station… Des personnes sans grand intérêt pour moi, évidemment. Encore un petit caprice avant d’accepter notre marché. N’ayez crainte, je vais gérer la situation !
– Et qu’avez-vous à proposer, qui ne dérangerait pas l’écoulement de nos plans, cher Tony ? demande Ezéquiel.
Votre Honneur, vous allez peut-être encore me prendre pour un fou, mais une idée révolutionnaire m’est venue pour pouvoir rassembler toutes les personnes les plus intelligentes et mllucntes de ce monde !
Soyez plus clair… Vous m’exaspérez avec vos mystères !
— Nous poumons organiser un grand évènement musical avec comme appât : notre princesse ! Les invités ne pourrai en accéder au parc que par une seule entrée ultra-sécurisée. Ensuite les uns après les autres seraient scannés grâce à un QR code Nous serions ainsi en mesure de répertorier et d’aller cueillir lef meilleurs potentiels ?
— Angie ? Aux commandes d’une scène musicale ? s’amuse Jared. Je pensais qu’elle ne jouait que de la musique classique !
— A l’âge de 17 ans, elle était Djay, rassemblant jusqu’à cinq mille personnes ou plus dans des festivals. Elle a un don extrasensoriel qui lui permet de lever des masses avec des sons progressifs et fascinants. Autrefois, elle m’a fait part de sa nostalgie à ne plus pouvoir jouer de musique, en raison des restrictions sanitaires.
— J’imagine que rassembler tous ses amis et les emmener une dernière fois dans son monde vibratoire ne pourra qu’entraîner une nouvelle vague de conscience sans précédent, renchérit Ezéquiel. Continuez !
— Pas seulement ! Ce sera sa dernière chance d’exprimer ses émotions, de faire le deuil de son passé, de l’illusion qu’elle s’est faite de ce monde. On le lui doit ; en retour, elle consentira à notre plan… Puisque son rêve ultime est de ramener Nikola et Regina, accordons-lui cette dernière demande !
— Très bien, Tony ! Vous avez carte blanche, tranche Ezéquiel. Cette fille ne fera-t-elle jamais que nous étonner !